Skip to main content

2017 UBS Colloquium detailed description

Familles, pouvoirs et foi en Bretagne et dans l’Europe de l’Ouest à l’époque médiévale
( Ve-XVe siècle)
Lorient 27-29 avril 2017

Marc Bloch déplorait que les études médiévales aient délaissé l’étude de la famille. Les travaux de G. Duby et K.-F. Werner ont, depuis lors, considérablement enrichi ce dossier : le premier a mené une enquête sur les structures familiales et les mentalités de la noblesse de l’Occident chrétien ; le second a montré que nombre des familles nobles du haut Moyen Âge plongent leurs racines dans celles de la fin de l’Antiquité. Les conclusions avancées et les pistes de recherche proposées par ces deux grands historiens ont ensuite été étoffées par de nombreuses études menées souvent à l’occasion de monographies régionales.

La notion de famille soulève de nombreuses questions. Ce terme qualifie-t-il un lignage né d’un couple, un groupe familial plus large voire une réalité supra-familiale ? Car il faut prendre en compte toutes les familiae laïque ou ecclésiastique dans lesquelles un homme peut être inséré à l’époque médiévale : familia née des liens vassaliques, familia monastique ou canoniale, etc.

La notion de familia a été étudiée dans ses aspects anthroponymique, sociologique et économique.

Ces journées d’études et de réflexion voudraient mieux saisir la place de la dimension spirituelle dans l’organisation et le fonctionnement des systèmes familiaux, en comprenant dans cette étude les communautés d’Eglise, moines et chanoines.

Trois directions de réflexion sont envisagées.

La première, s’acquittant de son dû à l’égard des recherches de K.-F. Werner et singulièrement envers son article consacré au rôle de l’aristocratie dans la christianisation du nord est de la Gaule, voudrait saisir de quelle manière ce milieu a participé à la christianisation des territoires sous son contrôle, par exemple, au travers d’un monastère, d’une paroisse ou d’un évêché. La fondation d’une église, son contrôle soutiennent le prestige d’une maison noble et de ses alliés. Le patronage devient alors un des éléments de puissance et de cohésion sociale pour le groupe. Ainsi, par exemple, les dévotions et les fêtes religieuses autour de saints locaux renforcent-elles la solidarité du groupe familial ? La piété, souvent sincère sans doute, n’est-elle pas aussi un vecteur utilisé pour affermir la puissance de la famille ? Mais aux siècles suivants, une fondation de monastère a-t-elle le même sens, les mêmes buts qu’à l’époque carolingienne ?

La seconde cherchera à saisir si cette dimension spirituelle a eu des incidences sur le devenir ou la prospérité des lignages, entre autres grâce aux formes de piété qui furent privilégiées. Ainsi il faudra se demander si la situation de sanctuaires à la frontière d’autres aires de pouvoirs politiques a eu des répercussions sur la grandeur future de certaines familles nobles. De même des réseaux de mémoire, de prières se sont-ils constitués à partir de réseaux familiaux, c’est-à-dire également politiques ou institutionnels ? Certains des membres de l’Eglise en sont peut-être venus à s’opposer à leur lignage biologique au profit du lignage « spirituel » qu’ils avaient choisi et à être désormais considérés comme des étrangers par leur parenté. Puisque la notion de « famille » s’étend pour ces époques à des parentés non biologiques, comment ces communautés humaines, laïques ou ecclésiastiques se comprennent-elles et comment sont-elles considérées et traitées par ceux qu’elles dirigent ou qui les dirigent ? Comment dans ce cas regarder l’excommunication  d’hommes d’Eglise ?

Enfin, K. F. Werner a exploré en profondeur la notion de principat. Les organisateurs de ce colloque appellent les contributeurs à établir un bilan sur les recherches menées par ce savant. Le prince en effet est chrétien depuis le temps de Constantin ; cela implique des responsabilités, défendre la foi, mais aussi des prérogatives reconnues, convoquer des conciles, exhorter les évêques à bien prêcher. Il s’agira d’observer comment et dans quelle mesure de telles attributions ont pu être tenues pour légitimement exercées de la part des rois et autres princes du haut Moyen Âge. Quelles furent, à partir de la fin du IXe siècle, les incidences de la dissociation territoriale sur la volonté et la capacité de la noblesse de se substituer aux princes dans leurs prérogatives religieuses ?

En Bretagne, il est indéniable que les ducs aux alentours de l’an Mil ont voulu assumer cette charge. Leur noblesse a-t-elle tendu à les imiter ? Quelle place la réforme de l’Eglise a-t-elle laissé aux aspirations de la noblesse dans ce domaine ?

Ces trois thèmes pourront notamment être abordés sous deux axes transversaux : la place des femmes et la culture matérielle.

Le don et la réception des femmes lors des échanges matrimoniaux ont-ils eu des conséquences spirituelles ? Quel fut le rôle des femmes dans la diffusion de nouvelles formes de prières monastiques ou de nouvelles dévotions ? Certaines eurent-elles une place privilégiée dans la vie spirituelle du territoire en charge de leur époux ? Ce rôle leur échoyait-il pour des raisons institutionnelles, une sensibilité personnelle ou le prestige de leur famille d’origine et de ses choix spirituels ?

La foi médiévale s’est appuyée sur des supports matériels : aspects et structures des églises, décors peints ou vitraux, statuaire, reliques. Quels furent les choix, entre autres esthétiques, faits par certains lignages ? Peut-on en reconstituant des réseaux artistiques entrevoir des relations politiques et religieuses ?

Voilà quelques unes des questions qui pourraient être traitées durant ces journées. Dans le cadre général proposé, il appartiendra évidemment aux contributeurs d’en proposer d’autres selon leurs centres d’intérêt.

 

Updated on July 27th, 2016.